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LIVRE II. — CHAPITRE V.

épicurienne[1]. Il ne paraît pas qu’il ait rien écrit. Nous avons déjà vu qu’il était, sur un point essentiel, en désaccord avec Clitomaque. Suivant ce dernier[2], Carnéade prescrivait de suspendre son jugement en toute question qui n’était pas d’ordre pratique. Suivant Métrodore, il autorisait l’assentiment, pourvu qu’il ne fût pas donné comme une certitude, et il estimait que le sage peut avoir des opinions. Peut-être était-ce Métrodore qui avait le mieux compris la pensée du maître. C’était du moins ce qu’il disait lui-même, au témoignage de l’Index[3] herculanensis. Cicéron[4] nous assure qu’il passait pour bien connaître Carnéade, et nous voyons, fait plus significatif encore, que Philon, se séparant de son maître Clitomaque, se rangea à l’interprétation de Métrodore[5]. C’est peut-être de Métrodore qu’est partie cette tradition recueillie par saint Augustin[6] et suivant laquelle les académiciens auraient, pour le plaisir de combattre les stoïciens, dissimulé leur propre dogmatisme, Il est difficile de croire cependant qu’il n’y ait pas là quelque malentendu ou quelque exagération[7].

Des autres disciples de Carnéade, nous ne connaissons que les noms : Mélanthius de Rhodes[8], Eschine de Naples[9], Mentor que Carnéade surprit chez sa propre maîtresse[10], et que, pour ce motif, il chassa de son école, enfin Hagnon de Rhodes[11]. L’Index Herculanensis[12] nomme encore Zénon d’Alexandrie, qui avait, comme Clitomaque, exposé dans ses écrits les idées de

  1. Diog., X, 9.
  2. Voy. ci-dessus, p. 133.
  3. Col. xxvi, 8 : Καρνεάδου παρακηκοέναι πάντας.
  4. Ac., II, vi, 16. Cf. De Orat., I, xi, 45.
  5. Ac., II, xxiv, 78.
  6. Contra academic., III, xviii, 41 : « Metrodorus… primus dicitur esse confessus, non decreto placuisse academicis nihil posse comprehendi, sed necessario contra stoicos hujusmodi eos arma sumpsisse. »
  7. Voy. ci-dessus, p. 117.
  8. Cic., Ac., II, vi, 16.
  9. Cic. De Orat., I, xi, 45. — Plut., An seni sit ger. Resp., xiii.
  10. Diog., IV, 63. — Euseb., loc. cit., viii, 13.
  11. Quintil., II, xvii, 15. — Athén., XIII, 602 d.
  12. Col. xxii et seq. Cf. xxxiii, xxxvi.