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la garçonne

Niquette serrait la main du fameux comique. Ils se connaissaient depuis toujours, ayant gagné sur les mêmes planches, grade à grade, leurs étoiles. Monique ne détestait pas la fantaisie de Briscot et, sous l’air voyou, sa bonne bille ronde.

— Tu ne joues donc pas ? demanda Niquette. Et la Revue ?

— Répétition pour les lumières…

— Alors tu vas me garder cette petite fille, qui a envie de danser encore… Et vous venez me prendre au Casino, tous les deux, après mon sketch, pas ?… On ira ensuite souper n’importe où.

Briscot fit le salut militaire, et Niquette parti tranquille… Ayant réclamé un irisch and soda, il s’était assis, à la place chaude. Il cligna de l’œil :

Dites donc, en passant rue de la Boétie cet après-midi, j’ai vu votre décoration de studio, turquoise et mandarine. Ça chante !…

— Vrai ? Pourquoi n’êtes-vous pas entré ?

— Pas mèche !… J’pistais une de ces Américaines… Tenez, dans vot’ genre ! Rose, les cheveux acajou… Et un de ces sautoirs ! Les perles lui tombaient aux genoux.

— Vous en avez fait autant ?

Il apprécia :

— Drôle. Ah ! Niquette ne s’embête pas…

— Et vous ?

— Moi non plus. Pour s’embêter dans ce bas monde, il faut être dingo ! Courte et bonne…

Il eut un rictus allusif :

— À votre service !

Merci, je n’en use pas. Gardez ça pour l’Américaine…