Page:Victor Margueritte - La Garçonne, 1922.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
142
la garçonne

yeux, aperçut Briscot au passage, et lui jeta un signe amical.

La danse achevée, elle le croisa, rejoignant la loge où tenait cercle Pierre des Souzaies, avec lequel elle était venue, Briscot serra, d’un air vexé, la main qu’elle lui tendait, en camarade.

— Compliments ! railla-t-il, en désignant l’Américain qui se perdait dans la foule. Vous ne vous embêtez pas !

Elle avoua avec tranquillité :

— Ma foi, non !

Et riant, au spectacle de sa moue à la fois ironique et pincée :

— Voyons, Briscot ! C’est donc si extraordinaire qu’en matière… d’amour, — (elle hésita, ne trouvant pas d’autre mot,) — une femme pense et agisse comme un homme ? Il faut vous faire à cette idée, et me prendre pour ce que je suis : un garçon !

Il eut, au bout des lèvres : une garce, et par politesse, acheva le mot :

— Une garçonne, je sais. La garçonne !

Mais, en dépit de son indulgence à tout faire, sa vanité regimbait. Il n’en risqua pas moins :

— Je vous retrouve, à la sortie ?

— Impossible, je regrette. Mon associé doit me présenter tout à l’heure Lucienne Marnier, avec qui nous avons rendez-vous.

— Ah ! Ah !

Elle haussa les épaules, devant le sourire qui insinuait.

— Vous m’avez bien fait connaître Edgard Lair pour la pièce de Perfeuil ! Et je n’ai pas couché avec lui. Lucienne Marnier… Vous la connaissez ?