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Page:Victor Margueritte - La Garçonne, 1922.djvu/167

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la garçonne

— C’est vous qui le dites.

Il se leva très pâle :

— En tout cas, des deux, c’est le plus bête qui est le moins inutile !… Je suis capable de faire des enfants, moi !…

Il montra les lettres :

— Tenez, tant que je veux ! Ce ne sont pas les occasions qui manquent.

Elle le toisa, hautaine. Mais le sarcasme avait porté. Une inutile, oui !… Et le sentiment de sa stérilité soudain s’agrandit, en elle, du désert de sa solitude… Elle répondit, blessée :

— Soyez tranquille ! Ce n’est pas moi qui vous retiendrai.

Puis, à la réflexion, elle avait ajouté, avec un sourire mélancolique :

— Tu as tort. Pourquoi se chamailler ? Camarades on s’est pris. Camarades on se quitte…


Peer Rys ! Il était à Rome, maintenant. Elle y songeait avec amitié, malgré ses défauts. Sans doute, dès le début, aucun ne lui avait échappé, mais ce n’était pas pour son ascendant intellectuel qu’elle l’avait aimé… Pouvait-elle réellement lui en vouloir de ce qu’il n’eût pas rempli, comme elle l’eût souhaité, toute son espérance ?

Par une tenace volonté de ne pas désespérer encore, c’était lui, et non elle, qu’elle rendait responsable de l’insuccès. Dès lors, médiocrité à part, et n’ayant passé avec lui que de bons, puis délicieux, puis