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la garçonne

qu’on parlait d’elle. Dussol lui fit des signes amicaux. Un instinct — sympathie pour l’un, curiosité pour l’autre — la poussa.

Elle se leva, afin de complimenter le vieux poète et sa femme… Aux premiers mots, Dussol présenta :

— Régis Boisselot… Monique Lerbier.

— Je connais monsieur, dit-elle, en serrant cordialement la grosse main noueuse qu’il avançait, maladroitement.

— Tout le monde a lu Les Cœurs sincères, observa Mme Dussol.

Boisselot grogna :

— Cinquième édition. Le monde est petit ! On le savait, madame.

Monique plaisanta :

— Mais non, puisque voilà quatre ans que je n’avais pas eu le plaisir de vous rencontrer !…

Elle expliqua, pour les Dussol :

— Chez Vignabos… Il y a… longtemps.

Elle surprit l’étonnement du romancier ; dans le regard qui, timide, n’osait se poser, et la dévisageait à la dérobée. Moche à ce point ? Elle pensa à l’expression de Blanchet, l’autre semaine… Boisselot aussi n’en revenait pas !

— Oui… longtemps ! murmurait-il.

— Au point que vous avez même failli ne pas me reconnaître ?

Il protesta :

— Ce sont vos cheveux courts… D’ailleurs je vous ai reconnue le premier…

— Difficilement…

Il se tut… C’est vrai, elle n’avait plus rien de commun avec l’éclatante fille dont le souvenir lui était