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la garçonne

— Paradoxe ! Prétendez-vous qu’on ne vive pas aujourd’hui dans le manoir à l’envers. Partout ! Et tous ! Hommes, femmes, c’est à qui mieux mieux.

— À qui la faute, messieurs ? demanda Mme Ambrat, qui venant de les rejoindre n’avait entendu que la dernière phrase.

— Pas à moi ! fit Régis, en tirant sur sa pipe qui brasilla.

— Les présents sont toujours exceptés !… dit-elle, en se rasseyant. Mais enfin si, dans l’anarchie actuelle, il y a quelqu’un de responsable, avouez que — si ce n’est vous, monsieur Boisselot, ni les apôtres que voilà, — (M. Vignabos et Georges Blanchet saluèrent, comiquement) — ce n’est pas non plus nous, pauvres femmes ! S’il ne dépendait que de notre volonté, soyez certain que les choses n’iraient pas si mal. Ce n’est pas nous qui aurions laissé d’abord faire la guerre ! Il y aurait aussi, si nous avions voix au chapitre, moins de bistros vendeurs d’alcool, moins de taudis faiseurs de tuberculose, moins de prostituées donneuses de syphilis. Et il y aurait plus de Maternités et plus d’Hospices. Il y aurait surtout plus d’écoles !

Monique se lova et vint embrasser son amie, Régis, d’un jet brusque, expira sa fumée :

— Joli programme ! Je le recommande à notre ami Blanchet, pour sa prochaine campagne électorale, Car vous y passerez, mon cher ! Cent sous qu’on vous affiche ! « Georges Blanchet, socialiste-féministe ! » Ça fera riche.

— En tout cas, cela ferait bien. Je partage entièrement l’avis de Mme Ambrat.

— Parbleu !… Une toute petite question, madame ?