Page:Victor Margueritte - La Garçonne, 1922.djvu/284

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
282
la garçonne

loppes. Elles s’y tordaient et s’y consumaient, sans qu’un reflet éclairât le morne regard dont elle suivait la dansante flamme.

Il ne se contenta pas d’écrire, se présenta plusieurs fois, toujours éconduit, impitoyablement. Il revenait, de ces infructueuses tentatives, tête basse, si sombre, avec ses airs de méditer un sale coup, que des passants, parfois, se retournaient.

À la fin de la semaine, sur les instances de la Russe, Monique se décida à écrire à Mme Ambrat. Celle-ci, grippée, n’avait pu venir rue de la Boëtie prendre des nouvelles, mais surprise de ne recevoir aucune réponse à sa dernière lettre, adressée à Rezeuil, elle avait, dans son petit mot de reproche affectueux, annoncé à Monique, tout à la fois, et sa courte indisposition et son désir de la revoir bientôt. Que devenait-elle ? On l’attendait sans faute, dimanche, à Vaucresson. Pour déjeuner, et, de préférence, seule ! Il n’y aurait que Vignabos et Blanchet…

Blanchet ?… Non ! elle ne voulait pas le rencontrer… Plus tard, peut-être… Elle avait un tel besoin de repos, d’oubli ! Bien qu’il songeât sans doute encore moins à elle qu’elle ne pensait à lui, et si sympathique qu’il fût, elle éprouvait une horreur physique de tout ce qui lui rappelait l’amour empoisonné de Régis. Une ombre en restait sur tout, et sur tous.

Tentée néanmoins, Monique, ayant réfléchi, se déroba par un refus catégorique, et une instante prière à sa vieille amie. « — Venez, vous ! J’ai tant, tant de choses à vous dire !… » Le lendemain, Mme Ambrat était là.

Et le soir elle ramenait Monique avec elle, à Vaucresson.