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la garçonne

venu ! Puis, d’un coup d’œil vers l’énigmatique Michelle, assise à sa droite, il constata qu’elle avait les jambes croisées si haut que les mollets et l’un des genoux s’offraient, dans leur gaine de soie.

Alors, ayant avancé sa chaise entre celles de l’ancêtre et de Ponette, ainsi bloquées, il feignit d’écouter, avec la plus profonde attention, Alex Marly qui nasillait, en dansant : « Je suis Méné, Méné… par le bout du nez ! » Il enserrait en même temps une des fines chevilles, captait la rondeur des mollets, puis du genou… Il s’arrêta, incertain, puis glissa, d’un attouchement léger, plus haut que le jarret, et comme, à ce geste précis, Michelle décroisait comme par hasard les jambes, il suivit son chemin, lentement. Ses doigts frôlaient, après la soie irritante, une peau si douce qu’il en eût voulu baiser la tiédeur…

Il était troublé au point que le cœur lui battait à grands coups. Nulle résistance. Alors hardiment il froissa les linons qui s’ouvrirent, palpa, dans son nid de mousse, le fruit mystérieux. Il comprit qu’il en était le maître, et le caressa, savamment. Mais soudain les jambes se resserrèrent en étau. Il lâcha prise et n’eut pas besoin de se retourner pour s’assurer que Michelle, raidie, venait d’éprouver une aussi complète sensation que celle qu’elle avait infligée, quelques heures plus tôt, à Cecil Meere.

Quand enfin nue (moins le cache-sexe et une draperie qui, en travers du corps, lui voilait un sein et le ventre), Hélène, aux applaudissements surexcités, eut reconquis Ménélas, Max de Laume se décida à affronter les yeux de sa partenaire. Il n’y lut que le naturel de la plus innocente camaraderie. Rien ne s’était passé. Il eut le bon goût de ne pas insister et