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Page:Vidal de la Blache - Tableau de la geographie de la France, 1908.djvu/71

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sécheresse les effets du climat. Les pâturages et les prairies règnent sur les argiles du Pays d’Auge, mais ils sont l’exception sur ces plateaux : terre de promission pour le blé qui, grâce à la profondeur de ses racines, n’a pas besoin d’être constamment humecté.

Entre les deux aspects de la France du Nord, l’Ile-de-France est la contrée médiatrice qu’elle est presque en toutes choses. La nature, alanguie dans les plaines aux contours mous du Berry et de la Champagne, se réveille dans l’Ile-de-France. Les sables siliceux de Fontainebleau, bordés d’eaux vives, abritent une flore chaude et une faune dans laquelle se glissent, comme en une oasis, quelques éléments tout à fait méridionaux. Les replis des vallées profondément burinées enveloppent des cultures de figuiers. Par ces traits l’Ile-de-France rappellerait le Midi. Mais elle a aussi ses forêts humides, et surtout ses grandes plates-formes agricoles qui, de Paris s’étendent vers la Picardie et le Vexin.


V DIFFÉRENCES DE NATURE SUR NOS COTES OCCIDENTALES

Ce sont deux mers différentes que celle qui, des Pays-Bas au Finistère, embrume souvent notre littoral, et celle qui rayonne de la Bretagne méridionale aux Pyrénées. C’est bien encore en ses jours de sauvagerie un Océan terrible que celui qui bat nos côtes du golfe de Gascogne et qui, de tout le poids de la houle accumulée dans mille lieues sans rivage, entame les craies dures de la Saintonge ou dévore les roches de Saint-Jean-de-Luz. Mais il ne ressemble plus à l’Océan celtique ou Scandinave. A mesure qu’on va vers le Sud, on s’écarte des voies ordinaires qui charrient vers nous, surtout en hiver, les bourrasques du large. En été la marche du soleil amène vers le Nord la zone de hautes pressions des Açores et répand le calme dans l’atmosphère de l’Océan d’Aquitaine. Le voile de nébulosité qui plane si fréquemment entre les côtes de Terre-Neuve et d’Irlande s’éclaircit notablement au Sud de la Bretagne. Un climat différent prévaut dans la zone que la France présente à la Manche et dans celle qu’elle présente au golfe d’Aquitaine.

Notre Finistère breton, comparé aux autres promontoires de l’Europe occidentale qui reçoivent de plein fouet l’assaut des bourrasques océaniques, se fait déjà remarquer par une atténuation des phénomènes. Ni par la rapidité des oscillations barométriques, ni par la fréquence des phénomènes électriques, ni par la quantité de pluie il n’égale la Norvège, l’Ouest de l’Irlande, la Cornouaille anglaise. Toutefois les parties non abritées subissent les effets corrosifs des vents du large, qui tourmentent ou tuent les arbres et forcent les cultures à se blottir à l’abri de ces murailles de pierre dont le pays est étrangement découpé. Mais c’est surtout l’insuffisance de chaleur qui, déjà marquée dès le mois d’avril et s’accentuant de plus en plus dans la période où les plantes doivent se hâter d’accumuler la chaleur nécessaire, empêche la vigne et la plupart des fruits d’atteindre la maturité. Les cultures maraîchères, les fraisiers, les primeurs variées, tout ce qui exige du climat plus de préco-