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Page:Vidalenc - William Morris.djvu/120

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roman de Dickens, Leech prit tellement peu de souci du texte qu’il fit enlever l’héroïne par un personnage qui n’avait rien à voir avec l’incident.

Morris commença par dessiner des lettres nouvelles. Les caractères en usage étaient alors d’aspect géométrique, rigide, étriqué. Or Morris pensait que toute lettre doit avoir sa beauté propre, qu’elle doit être dessinée par un artiste et non par un ingénieur ; il substitua donc des lettres larges, arrondies, inscriptibles en général dans un carré aux caractères habituels allongés et inscriptibles dans un rectangle. Chaque lettre avait sa physionomie particulière, c’était à ses yeux une erreur et une faute de goût que de considérer l’u comme un n renversé ou réciproquement, de croire que dans les lettres d, h, p, q, seule diffère la position de la partie arrondie par rapport à la partie droite.

Il rappelait le souvenir et l’exemple des grands imprimeurs du XVe siècle, et notamment du plus grand de tous : Nicolas Jenson de Tours, établi à Venise vers 1469. Jamais livres ne furent plus beaux, plus harmonieux, que ceux qui sortirent de ses presses, disait-il, et pourtant ils sont pour la plupart sans ornement aucun ; leur beauté dépend uniquement de la forme élégante des caractères employés et de leur disposition dans la ligne et dans la page.

L’Angleterre n’avait jamais connu la splendeur de Venise, mais elle avait eu sa part de gloire. Aux XVe et XVIe siècles les presses de Caxton et de Wynkyn de Worde avaient acquis une renommée bien méritée, mais