Page:Vidalenc - William Morris.djvu/43

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j’essaye. Je dois dire que je n’espère guère, mais je ferai de mon mieux ; il m’a donné des conseils pratiques à ce sujet. Donc je vais essayer, sans abandonner l’architecture, mais tâchant, si possible, de consacrer chaque jours six heures au dessin, en sus de mon travail de bureau. Il est impossible de s’amuser beaucoup dans ces conditions-là, mais cela n’a aucune importance ; après tout, je n’ai aucun droit à réclamer ces amusements. »

C’est là une confidence qui nous est d’autant plus précieuse que Morris a toujours été très sobre de renseignements sur lui-même ; il aimait à répandre ses idées, mais de ses sentiments nous ne savons pas grand’chose, car il jugeait que la personnalité de l’artiste ou du poète est sans intérêt et que l’œuvre seule importe. Il faut se souvenir qu’il avait alors vingt-deux ans, qu’il était riche, indépendant, libre d’orienter sa vie à sa guise, mais nous le voyons accepter joyeusement un labeur écrasant. Il demeure hésitant, cherchant sa voie, doutant de lui même malgré les encouragements de Rossetti ; mais nous pouvons prévoir qu’il ne se bornera pas à suivre les sentiers battus et les routes faciles ; il y a dans son attitude en face de la vie une tranquille détermination qui nous fait bien augurer de l’œuvre qui suivra.

Vers la fin de 1856 l’architecte Street avait transféré ses bureaux à Londres, et Morris, enchanté de ce déménagement, s’en était allé habiter avec Burne-Jones. Pendant quelques mois il mena une vie de travail intense, occupé toute la journée à ses plans et le soir à ses études