Page:Vidalenc - William Morris.djvu/48

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lèvres charnues, les grands yeux cernés d’ombre, la chevelure abondante et crêpelée, la physionomie attirante et douce et qui demeure un peu énigmatique, constituent ce qu’on est convenu d’appeler la beauté préraphaélite.

Le mariage fut célébré à Oxford le 26 avril 1859 Morris avait jusqu’alors continué à peindre et à écrire. En 1858 il acheva La Reine Genièvre, la seule peinture de lui qui nous reste, et publia son premier recueil de vers : La défense de Genièvre. Ni la toile, ni le volume ne firent sensation comme il fallait s’y attendre. Pourtant, malgré une certaine gaucherie, les deux œuvres ne sont pas sans mérite et elles sont caractéristiques de l’inspiration et des sympathies de Morris. Il y évoque un moyen âge pittoresque selon son rêve; il ne songeait nullement à entreprendre une restitution patiente d’archéologue, encore qu’il fût très averti des choses médiévales, et il se contentait de faire revivre les belles légendes héroïques ou amoureuses du cycle de la Table Ronde. La reine Genièvre, Lancelot le preux chevalier, le roi Arthur, Tristan de Léonnois, la belle Iseut aux cheveux d’or sont les personnages habituels de ses toiles ou de ses poèmes. Il semblait vivre dans le passé et partager les espoirs et les haines des héros qu’il évoquait.

Mais dès que Morris fut marié, des préoccupations nouvelles vinrent l’absorber et l’orienter définitivement vers l’art décoratif. Il songea en effet à se créer ce « home » si cher à tout Anglais, et plus encore que pour lui-même quand il s’était établi à Red Lion Square, il voulut pour