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d’argent « pour les qualités de couleur et de dessin de leurs vitraux » et « l’excellent aspect de leurs tapisseries et meubles ». C’était un gros succès d’amour-propre, un encouragement pour l’avenir, mais le présent restait difficile. Les visiteurs s’étaient curieusement arrêtés devant les œuvres exposées, mais il y avait eu plus d’admirateurs que de clients. En fait le grand public avait été plutôt déconcerté par ces premières productions et effaré par ces couleurs vives dont on n’avait plus l’habitude. C’était toute une éducation à faire et elle se faisait assez lentement, d’autant plus lentement que les adversaires n’avaient pas désarmé et que les critiques ne manquaient pas. Les concurrents appréciaient sans indulgence ce qu’ils appelaient un coloris barbare et un manque de goût manifeste, d’autres criaient au plagiat et allaient jusqu’à dire que les vitraux exposés étaient d’anciens vitraux du XIVe siècle qu’on s’était contenté de restaurer.

Il n’y a pas d’observateur plus perspicace qu’un ennemi, dit-on. Ce reproche de plagiat nous révèle en effet un des caractères essentiels des productions de Morris à cette époque : l’imitation du moyen âge. Il avait cherché à s’assimiler la technique et les procédés de composition des maîtres verriers du XIIIe siècle et, pour exagérée qu’elle soit, la critique de ses concurrents montre qu’il y avait réussi. Plus tard il se dégagera de cette imitation trop étroite, et, grâce à lui, le XIXe siècle connaîtra des vitraux qui, quoique différents d’aspect, ont un peu du charme des verrières de nos cathédrales.