Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/24

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l’abandon de cette hospitalité antique, qui ne se bornait pas au festin. À minuit, probablement, je dis probablement, car nous ne comptions plus les heures, j’avais la tête lourde, mes jambes ne pouvaient plus me porter ; il y avait autour de moi un mouvement de rotation générale, et les choses tournèrent de telle sorte que, sans m’être aperçu que l’on m’eût déshabillé, il me sembla être en chemise sous le même édredon qu’une des nymphes blakembergeoises : peut-être était-ce vrai ; tout ce que je sais, c’est que je m’endormis. À mon réveil, je sentis une vive impression de froid… Au lieu des vastes rideaux verts qui m’avaient apparu comme dans un songe, mes yeux appesantis entrevoyaient une forêt de mâts, et j’entendais ce cri de vigilance qui ne retentit que dans les ports de mer ; je voulus me lever sur mon séant, ma main s’appuya sur un tas de cordages auxquels j’étais adossé. Rêvais-je maintenant ou bien avais-je rêvé la veille ? Je me tâtai, je me secouai, et quand je fus debout, il me fut démontré que je ne rêvais pas et, qui pis est, que je n’étais pas du petit nombre de ces êtres privilégiés à qui la fortune vient en dormant. J’étais à demi vêtu, et, à part deux écus de six livres que je trouvai dans une des poches de ma