Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/279

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par précaution, car j’en vis plusieurs quitter leur attelage avec un fusil qu’ils tiraient d’un sillon. Un de ces derniers passa tout près de moi dans un chemin de traverse que j’avais pris en entendant les coups de canon, mais il n’eut garde de me reconnaître ; j’étais d’abord vêtu fort proprement, et de plus mon chapeau, que la chaleur permettait de porter sous le bras, laissait voir des cheveux en queue, qui ne pouvaient appartenir à un forçat.

Je continuai à m’enfoncer dans l’intérieur des terres, évitant les villages et les habitations isolées. À la brune, je rencontrai deux femmes, auxquelles je demandai sur quelle route je me trouvais ; elles me répondirent dans un patois dont je ne compris pas un mot ; mais leur ayant montré de l’argent, en faisant signe que je désirais manger, elles me conduisirent à l’entrée d’un petit village, dans un cabaret tenu par… le garde champêtre, que je vis sous le manteau de la cheminée, revêtu des insignes de sa dignité. Je fus un instant démonté, mais, me remettant bientôt, je lui dis que je voulais parler au maire. — « C’est moi », dit un vieux paysan en bonnet de laine et en sabots, assis à une petite table, et mangeant de la galette de sarrasin. Nouveau