Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/301

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ouvrit une porte pratiquée dans la boiserie, et me fit entrer dans une salle basse, où huit hommes et deux femmes jouaient aux cartes, en buvant de l’eau-de-vie et des liqueurs. « Tenez », dit ma conductrice en me présentant à la compagnie, fort étonnée de l’apparition d’une religieuse ; « tenez, voilà la sœur qui vient vous convertir. » En même temps, j’arrachai ma guimpe, et trois des assistants, que j’avais vus au bagne, me reconnurent : c’étaient les nommés Berry, Bidaut-Mauger, et le jeune Goupy, que j’avais rencontré à Quimper ; les autres étaient des évadés du bagne de Rochefort. On s’amusa beaucoup de mon travestissement : lorsque le souper nous eut mis en gaieté, une des femmes qui se trouvaient là, voulut s’en revêtir, et ses propos, ses attitudes contrastaient si étrangement avec ce costume que tout le monde en rit aux larmes jusqu’au moment où l’on alla se coucher.

À mon réveil, je trouvai sur mon lit des habits neufs, du linge, tout ce qu’il fallait enfin pour compléter ma toilette. D’où provenaient ces effets ? C’est ce dont je n’avais guère le loisir de m’inquiéter. Le peu d’argent que je n’avais pas dépensé à l’hôpital de Quimper, où tout