Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/410

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paroles produisirent l’effet que je m’en étais promis. Le commissaire, qui était un brave homme, me fit déferrer en sa présence, et donna l’ordre de me mettre de suite à la fatigue. On m’accoupla avec un nommé Salesse, gascon aussi malin que peut l’être un forçat. La première fois que nous fûmes seuls, il me demanda si j’avais l’intention de m’évader. « Je n’ai garde d’y penser, lui répondis-je ; ne suis-je pas déjà assez heureux que l’on me laisse travailler ? »Cependant Jossas possédait mon secret : ce fut lui qui disposa tout pour mon évasion. J’eus des vêtements bourgeois, que je cachai sous mes habits de galérien, sans même que mon camarade de couple s’en aperçût. Un boulon à vis avait remplacé le boulon rivé de la manicle, et j’étais prêt à partir. Le troisième jour après avoir quitté mes compagnons, je sors pour me rendre à la fatigue. et me présente à la visite de l’argousin : « Passe, mariase (vaurien), me dit le père Mathieu, il n’est pas temps. » Me voilà dans la corderie ; l’endroit me paraît propice ; je dis à mon camarade que j’ai à satisfaire un besoin ; il m’indique des pièces de bois derrière lesquelles je puis me placer, et à peine m’a-t-il perdu de vue, qu’ayant jeté ma casaque rouge et dévissé le