Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/411

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boulon, je me mets à fuir dans la direction du bassin. On y réparait alors la frégate Muiron, l’une de celles qui avaient ramené d’Égypte Bonaparte et sa suite. Je monte à bord et demande le maître charpentier que je savais être à l’hôpital. Le coq (cuisinier), à qui je m’adresse, me prend pour un homme du nouvel équipage. Je m’applaudis de son erreur, et pour l’y confirmer de plus en plus, comme à l’accent j’ai reconnu qu’il est Auvergnat, j’engage avec lui, dans le patois de son pays, une conversation que je soutins du ton le plus assuré ; cependant j’étais sur les épines : quarante couples de forçats travaillaient à deux pas de nous. D’un instant à l’autre on pouvait me reconnaître. Enfin une embarcation part pour la ville, je m’y précipite, et, saisissant un aviron, je fends la lame comme un vieux matelot ; bientôt nous sommes dans Toulon. Pressé de gagner la campagne, je cours à la porte d’Italie, mais personne ne sort sans être muni d’une carte verte, délivrée par la municipalité ; on me refuse le passage, et tandis que je cherche dans mon esprit comment je viendrai à bout de prouver que la consigne n’est pas pour moi, j’entends les trois coups de canon qui donnent au loin le signal