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VOYAGE EN ESPAGNE.

Madrid est loin, et la frontière portugaise n’est qu’à quelques lieues : il essaiera de la gagner. Le jour même un secours inespéré se présente à lui. Le maître de la posada, où l’on s’arrête au milieu du jour, est un Français, depuis longtemps établi en Espagne ; il protège ses compatriotes contre la populace ameutée, et leur avouant ses relations avec une troupe de contrebandiers, il leur offre de prendre pour guides, la nuit prochaine, ses redoutables amis. Ainsi une voie de salut se rouvre devant eux !

Mais ils n’étaient pas au terme des péripéties de cette journée ! Des cavaliers, un officier civil à leur tête, arrivent de Mérida. Les voyageurs sont arrêtés et conduits à la ville. Ils y entrent vers minuit. Malgré l’heure avancée, on les attendait, et la foule se pressait sous les arcades du tribunal. Des cris de fureur sont proférés, des pierres lancées sur eux, et l’escorte a peine à contenir le peuple qui veut lui arracher les deux Français. Enfin, c’est du moins un asile ! la prison s’ouvre devant eux. On les jette dans la salle commune, au milieu des malfaiteurs : un assassin s’y trouvait ! Et comment oublier ce dernier trait ! Les condamnés, l’assassin lui-même, les repoussent, les menacent, et peu s’en faut qu’une lutte horrible n’ensanglante la prison !

Trois jours s’écoulent ainsi. Les magistrats refusent de les entendre, et chaque matin des attroupements menaçants se forment devant les portes.