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CHAPITRE VI.

Le peuple réclame à grands cris ses victimes : les magistrats qui refusent de les lui livrer, sont des traîtres ; il les menace ; il veut forcer la prison. Une fois même on essaie d’y mettre le feu : plutôt la mort de tous les prisonniers que le salut des Français !

Dans cette crise terrible, réduits à se nourrir des aliments les plus grossiers, couchés sur une paille fétide, entendant de leur prison les vociférations de la populace, ne trouvant dans le souvenir de leurs familles absentes qu’une douleur de plus, ne pouvant espérer de personne en Espagne ni un secours ni une consolation, Geoffroy Saint-Hilaire et son jeune compagnon montrèrent ce qu’il y a de puissance dans le vrai courage. La fermeté de leur contenance, quand ils semblaient au dernier jour de leur vie, frappa tous ceux qui en furent témoins. La férocité même des malfaiteurs fut vaincue : les deux Français se virent désormais respectés des autres prisonniers. Ce fut le premier adoucissement à leur sort.

Bientôt un rayon d’espoir vint luire dans leur prison. Quand ils se croyaient abandonnés de tous, une main amie s’étendait sur eux. Un léger service allait être payé par un bienfait.

Quelques jours auparavant, au moment où une dame espagnole versait sur la route et se blessait légèrement, les deux Français, fort heureusement pour elle, plus heureusement pour eux-mêmes,