Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/156

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L’abbé Sicard ne sembloit vivre que pour eux. Il ne parloit que de leur infortune, de leurs babitudes, de leurs plaisirs, de leurs progrès. Il se plaisoit à montrer le développement de leur intelligence, à dévoiler le mécanisme de son muet enseignement ; il aimoit à les produire dans le monde ; il sembloit dire, il disoit même : « Vous savez ce qu’en avoit fait la nature, et vous voyez ce que j’en ai su faire. » On a pris quelquefois ce langage pour de l’orgueil, ce n’étoit que de la simplicité. Toujours prêt à louer les autres, il ne se doutoit pas qu’on dût rougir de se louer soi-même. L’abbé Sicard étoit le plus simple, le plus bienveillant, le plus facile des hommes ; il ne savoit ni blâmer ni contredire ; et ceux qu’une heure d’entretien aura mis à même d’apprécier ce modèle de douceur et de complaisance s’étonneront que les auteurs du 18 fructidor aient osé proscrire un homme qui ne savoit peut-être pas ce que c’étoit qu’une opinion politique, et ce que vouloient les vainqueurs et les vaincus de cette journée. Je crains, madame, que ce portrait fidèle ne lasse douter de son esprit ; je me hâte d’ajou-