Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/20

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que à chaque pas ; et j’aurois pris souvent ces êtres immobiles pour des statues posées sur des sépulcres, si un profond soupir, ou des sanglots mal étouffés, n’étoient venus m’avertir de leur existence. Je m’éloignois alors sans bruit, de peur de troubler leur entretien mystérieux avec la tombe.

J’avois pris en entrant le chemin qui s’étoit offert à ma droite. Les chars funèbres avoient laissé leur double empreinte sur cette route, que des arbres jeunes encore ombrageoient de leurs cimes verdoyantes. Les noms gravés sur les premières pierres ne rappeloient rien à ma mémoire ; ils n’obtinrent de moi qu’un regard passager.


Je sais bien que la mort nivelle tous les rangs ;
Que du jour où Caron, dans sa fatale barque,
Nous sépare à jamais du séjour des vivants,
Le pauvre et l’opulent, le pâtre et le monarque,
Aux yeux de l’Éternel ne sont point différents.


Mais je lui laisse le soin d’apprécier toutes ces vertus domestiques, dont je trouve ici les modèles ; et je me ferois un scrupule de donner un démenti sacrilège à toutes ces épita-