Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/263

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lui en auroient fait un crime, ni par le spectacle horrible des victimes illustres qu’amonceloient tous les jours dans ce même cimetière les infâmes agents de la terreur ; et quand des jours moins malheureux vinrent luire sur la France, il se hâta d’acquérir et de joindre à son domaine le terrain précieux qui renfermait ces dépouilles augustes.


Il orna de ses mains cette enceinte sacrée.
Un gason frais et pur couvrit les deux tombeaux.
De verdure et de fleurs la terre fut parée ;
Et le saule au cyprès y joignit ses rameaux.
La cour à ce vieillard fut toujours étrangère ;
Mais son cœur généreux, témoin de tant d’horreurs,
Pouvoit-il refuser sa pitié tutélaire
A ces nobles martyrs des publiques fureurs ?
Dans ce bocage, où régnoit le mystère,
Il venoit chaque jour épancher ses douleurs.
De ses prières, de ses pleurs,
Il portoit chaque jour l’hommage solitaire
Au roi, qu’oublioient ses flatteurs.
Si j’en crois des récits que le peuple répète.
Un soir que sur la tombe il reposoit sa tête.
Le sommeil le surprit dans ce triste séjour.
C’étoit la veille de ce jour
Où l’Église des morts solennise la fête,