Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/28

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ses tristes regards. J’implorai la faveur de pénétrer dans cette enceinte ; et il vint lui-même m’en ouvrir la porte. « Ici reposent, me dit-il, les cendres des enfants d’Israël ; et j’y bénis le dieu d’Abraham de ce triomphe de la tolérance. Ces malheureux que toutes les nations chrétiennes se sont acharnées à persécuter pendant dix-huit siècles, que, par un oubli sacrilège des paroles du Christ, des moines barbares osoient offrir en holocauste à celui qui nous avoit pardonné, ces malheureux ne sont plus rejetés de la société des vivants et des morts ; ils ne sont plus resserrés par un préjugé terrible entre l’infamie et la misère, entre la rigueur des lois, qui les repoussoient des professions honorables, et l’injustice de l’opinion, qui leur reprochoit la bassesse de leur industrie. La table où ces lois avoient été gravées par le fanatisme a été brisée par la philosophie. Nous ne sommes plus errants dans cette vallée de larmes ; nous avons une patrie et des tombeaux. La France a donné cet exemple au monde ; et les Israélites, qu’elle a reçus au rang de ses citoyens, lui ont prouvé, par leurs services,