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Page:Viennet - Promenade philosophique au cimetière du père la Chaise.djvu/33

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Que n’étoient-ils témoins de ces pleurs honorables,
Ces puissants orgueilleux, ces grands insatiables,
Qui, du trésor public ardents déprédateurs,
Couvrent de soie et d’or leurs palais et leurs tables,
Et prodiguent à leurs flatteurs
La substance des misérables !
Quelle honte sur-tout pour ces vils parvenus
Qui, de leur origine oubliant la bassesse,
Et les haillons dont ils furent vêtus,
Repoussent de leurs bras l’ami de leur jeunesse,
Et de leurs froids dédains accablant sa détresse,
Insultent aux malheurs qu’ils ne connoissent plus !
Puisse un jour la fortune, en sa juste colère,
Les replonger dans la misère,
Et de leur lâche orgueil venger l’humanité !
Mais que la terre soit légère
A cet ange de charité !
Que dans les cieux et sur la terre
Sa modeste vertu reçoive le salaire
Que ses bienfaits ont mérité !


Je sortis à ces mots de l’enceinte que s’étoient réservée les Israélites ; et, laissant à ma droite l’avenue qui m’a voit conduit au tombeau d’Abailard, je me dirigeai par un autre chemin vers la colline, où mille sépulcres entassés sembloient promettre une ample ma-