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CHANT II.

« Ces flambeaux naturels s’allument sous ses pas,
« Et leur feu clair la guide et ne la trahit pas.
« Si sa lèvre s’altère et vient près du rivage
« Chercher comme une coupe un profond coquillage,
« L’eau soupire et bouillonne, et devant ses pieds nus
« Jette aux bords sablonneux la Conque-de-Vénus.
« Des Esprits lui font voir de merveilleuses choses,
« Sous des bosquets remplis de la senteur des roses ;
« Elle aperçoit sur l’herbe où leur main la conduit
« Ces fleurs dont la beauté ne s’ouvre que la nuit,
« Pour qui l’aube du jour aussi sera cruelle,
« Et dont le sein modeste a des amours comme elle.
« Le silence la suit, tout dort profondément ;
« L’ombre écoute un mystère avec recueillement.
« Les vents des prés voisins apportent l’ambroisie
« Sur la couche des bois que l’amant a choisie.
« Bientôt deux jeunes voix murmurent des propos
« Qui des bocages sourds animent le repos ;