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ÉLOA, CHANT II.

« Au fond de l’orme épais dont l’abri les accueille,
« L’oiseau réveillé chante et bruit sous la feuille.
« L’hymne de volupté fait tressaillir les airs,
« Les arbres ont leurs chants, les buissons leurs concerts,
« Et sur les bords d’une eau qui gémit et s’écoule,
« La colombe de nuit languissamment roucoule.


« La voilà sous tes yeux l’œuvre du Malfaiteur ;
« Ce méchant qu’on accuse est un consolateur
« Qui pleure sur l’esclave et le dérobe au maître,
« Le sauve par l’amour des chagrins de son être,
« Et dans le mal commun lui-même enseveli,
« Lui donne un peu de charme, et quelquefois l’oubli. »
Trois fois, durant ces mots, de l’Archange naissante
La rougeur colora la joue adolescente,
Et luttant par trois fois contre un regard impur,
Une paupière d’or voila ses yeux d’azur.