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Page:Vigny - Journal d’un poète, éd. Ratisbonne, 1867.djvu/93

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JOURNAL D’UN POÈTE

Dans la journée, ma mère me reconnaît. Elle me pénètre de douleur et de reconnaissance en me parlant avec amour ; elle est charmée de me voir près d’elle, je lui fais plus de bien que les médecins, dit-elle. — J’ai réussi avec ma voix à la calmer en lui parlant.

——

19 MARS. ~ Nuit affreuse. — Saignée. Consultation de MM. Salmade, Magistei et Doulile. — Émétique.

Le cerveau est dégagé. Sa vie sauvée.

Depuis ce jour, elle s’affaiblit, puis reprend des forces.

Elle a sa tête et me donne ses clefs. Elle me prie de diriger ses affaires. Heureuse de n’avoir plus à y penser. Elle me dit devant Lydia[1] et le médecin, qu’elle n’a pas fait de testament et ne laisse rien qu’à moi, et à Angélique, sa femme de chambre, une pension qu’elle me prie de lui faire. J’en fais sur-le-champ l’engagement et le remets à Angélique devant elle. — Cela lui donne beaucoup de caime. La nuit est bonne. Je trouve un ordre admirable dans ses papiers ; je les remets devant elle dans son secrétaire, et je ne prends rien de l’argent qu’il renferme ; je veux que, si elle est guérie, elle retrouve tout dans l’état où elle l’a laissé.

  1. La femme du poëte, née Lydia Bunbury