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LES DESTINÉES.


Elles avaient posé leur ongle sans pitié
Sur les cheveux dressés des races éperdues,
Traînant la femme en pleurs et l’homme humilié.

Un soir il arriva que l’antique planète
Secoua sa poussière. − Il se fit un grand cri :
« Le Sauveur est venu, voici le jeune athlète,

« Il a le front sanglant et le côté meurtri,
« Mais la Fatalité meurt au pied du Prophète,
« La Croix monte et s’étend sur nous comme un abri ! »

Avant l’heure où, jadis, ces choses arrivèrent,
Tout homme était courbé, le front pâle et flétri.
Quand ce cri fut jeté, tous ils se relevèrent.