Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
100
poèmes antiques et modernes
» Et, le jour de ma mort, nulle vierge jalouse
» Ne viendra demander de qui je fus l’épouse[1],
» Quel guerrier prend pour moi le cilice et le deuil[2] :
» Et seul vous pleurerez autour de mon cercueil. »
Après ces mots, l’armée assise tout entière
Pleurait, et sur son front répandait la poussière[3].
Jephté sous un manteau tenait ses pleurs voilés[4] ;
Mais, parmi les sanglots, on entendit : « Allez[5]. »
Elle inclina la tête et partit. Ses compagnes.
Comme nous la pleurons, pleuraient sur les montagnes.
Puis elle vint s’offrir au couteau paternel[6].
— Voilà ce qu’ont chanté les filles d’Israël.
Écrit en 1820[7].
- ↑ Fleury, Mœurs des Israélites, 1712, p. 165 : La virginité, considérée comme une vertu, était encore peu connue : on n’y regardait que la stérilité, et l’on estimait malheureuses les filles qui mouraient sans être mariées… Ce fut le sujet des regrets de la fille de Jephté. — D. Calmet, Dissertation sur les mariages des Hébreux, dans la Bible de Vence, VIII, 1721, p. 409 : La virginité était un opprobre dans Israël… De Là viennent les pleurs de la fille de Jephté, qui fait le deuil de sa propre personne, comme d’une personne morte, parce qu’elle mourait sans être mariée et sans avoir donné des héritiers à son père.
- ↑ Fleury, Mœurs des Israélites, 1712, p. 225 : Il fallait [en signe de deuil] porter des habits sales et déchirés, ou des sacs… Ils les nommaient aussi cilices.
- ↑ Fleury, ouvr. cité, p. 222 : Ils demeuraient assis à terre ou couchés sur la cendre [en signe de deuil]… Les marques de deuil étaient de déchirer ses habits sitôt qu’on apprenait une mauvaise nouvelle,… mettre ses mains sur sa tête,… et y jeter de la poussière ou de la cendre.
- ↑ Fleury, ouvr. cité, p. 223 : Quelquefois ils s’enveloppaient d’un manteau pour ne point voir le jour et cacher leurs larmes.
- ↑ Juges, XI, 58 : Jephté lui répondit : Allez.
- ↑ Juges, XI, 38-39 : Elle alla donc avec ses compagnes et ses amies, et elle pleurait sa virginité sur les montagnes. Après les deux mois, elle revint trouver son père, et il accomplit ce qu’il avait voué b. l’égard de sa fille.
- ↑ La date manque dans P1.