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la femme adultère

Tel est le front glacé de la Juive infidèle[1].
Mais quel est cet enfant qui paraît auprès d’elle ?
Il voit des pleurs, il pleure, et, d’un geste incertain,
Demande, comme hier, le baiser du matin.
Sur ses pieds chancelants il s’avance, et, timide,
De sa mère ose enfin presser la joue humide.
Qu’un baiser serait doux ! elle veut l’essayer[2] ;
Mais l’époux, dans le fils, la revient effrayer[3] ;
Devant ce lit, ces murs et ces voûtes sacrées.
Du secret conjugal encore pénétrées,
Où vient de retentir un amour criminel[4],
Hélas ! elle rougit de l’amour maternel,
Et tremble de poser, dans cette chambre austère,


    d’alentour, et tout ce qui avait quelque verdeur sur la terre. La femme de Lot regarda derrière elle, et elle fut changée en une statue de sel.

  1. Var v. 69-72 : M1, 1er  main, Tel est le front glacé de l’infidèle Juive. | Quel remords (corr. : vœu) fait trembler sa lèvre convulsive, | Cette lèvre où naguère a frémi le plaisir ? | Si le destin alors eût comblé son désir, | Que n’a-t-elle arrêté (corr. : Sombre, il eût retenu) cette nuit sa complice, | Un rayon de soleil est son premier supplice.

    2e main, Tel est le front glacé de la Juive infidèle, | De la faiblesse humaine infortuné modèle, | Où lèves-tu ces yeux qu’inondait le plaisir ? | La crainte en traits brûlants y grave ton désir, | Tu voudrais retenir cette nuit, ta complice, | Et la première aurore est ton premier supplice.

    3e main, Tel est le front glacé de la Juive infidèle, | Mais quel est cet enfant qui se joue auprès (1er  corr. : rit et court auprès, 2e corr. : parait auprès) d’elle ? | Quel est ce jeune enfant qui d’un pas (1er  corr. : Le jour l’a fait venir et d’un œil 2e corr. : Il voit des pleurs, il pleure, et d’un geste) incertain | Vient en riant chercher (corr. : Demande comme hier) le baiser du matin.

  2. Var : M1, 1er  main, Elle veut l’embrasser, mais comment le tenter ? 2e main, Un baiser la rassure, elle veut l’essayer ; 3e main, Qu’un baiser serait doux ! elle veut l’essayer ;
  3. Var : M1, Mais (son biffé) l’époux dans (son biffé) le fils la vient (?) épouvanter (corr. : revient effrayer.)
  4. Var v. 79-80 : M1, 1er  main, Le baiser maternel n’ose plus s’approcher ; | Elle au sein de la terre eût voulu se cacher ; 2e main, texte actuel.