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Page:Vigny - Poèmes antiques et modernes, éd. Estève, 1914.djvu/232

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poèmes antiques et modernes

En spectacles pompeux la nature est féconde :
Mais l’homme a des pensers bien plus grands que le monde.
Quelquefois tout un peuple endormi dans ses maux
S’éveille, et, saisissant le glaive des hameaux,
Maudissant la révolte impure et tortueuse[1].
Élève tout à coup sa voix majestueuse :
Il redemande à Dieu ses autels profanés,
Il appelle à grands cris ses Rois emprisonnés[2] ;
Comme un tigre, il arrache, il emporte sa chaîne ;
Il s’élève, il grandit, il s’étend comme un chêne[3],
Et de ses mille bras il couvre en liberté
Les sillons paternels du sol qui l’a porté.
Ainsi, terre indocile, à ton Roi seul constante,
Vendée, où la chaumière est encore une tente,
Ainsi de ton Bocage aux détours meurtriers[4]
Sortirent en priant les paysans guerriers :
Ainsi, se relevant, l’infatigable Espagne
Fait sortir des héros du creux de la montagne.



Sur des rochers, non loin de ces antres sacrés,
Où Pelage appela les Goths désespérés[5],
D’où sort toujours la gloire, et qui gardent encore,
Hélas ! les os français mêlés à ceux du More,
Au-dessus de la nue, au-dessus des torrents.
Viennent de s’assembler les montagnards errants.
La pourpre du réseau dont leur front s’environne

  1. Var : O2, O3, Révolte
  2. Var : O1, rois
  3. Var : O1-O3, P2, A, Il se lève
  4. Var : O1-O3, bocage
  5. Var : O1, D’où les Goths foudroyaient leurs vainqueurs massacrés,