Page:Vigny - Poèmes antiques et modernes, éd. Estève, 1914.djvu/264

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PARIS

élévation[1]


Le poème est précédée dans O de la note suivante :

Ce poëme, sorte de rêve symbolique, est détaché d’un recueil, incomplet encore, intitulé : Élévations. Le temps emporte si vite les événemens, les impressions, les pressentimens qu’ils font naître, qu’il peut être bon de donner sa date à la moindre chose, quoique cette feuille soit du nombre de celles que le vent emporte, sans qu’on les ait vues passer.

Sous-titre : O, Élévation XIe.


« Prends ma main, Voyageur, et montons sur la tour[2]. —
Regarde tout en bas, et regarde à l’entour.
Regarde jusqu’au bout de l’horizon, regarde
Du nord au sud. Partout où ton œil se hasarde,

  1. Pour ce sous-titre, voir p. 223, n. 2.
  2. Le cadre de ce poème visionnaire, où passent des réminiscences certaines de l’Apocalypse (voyez v. 215-221) a peut-être été suggéré par ce verset de la « Révélation » de Saint-Jean (XXI, 10) : « Et il [l’Ange] me transporta en esprit sur une grande et haute montagne, et il me montra la ville, la sainte Jérusalem, qui descendait du ciel, venant de Dieu… » Le poète y a mis les pensées qui lui venaient à l’esprit, quand au cours de quelque promenade solitaire, il « contemplait d’en haut » la grande ville : « L’autre jour, je montai à Montmartre. Ce qui m’attrista le plus fut le silence de Paris quand on le contemple d’en haut. Cette grande ville, cette immense cité ne fait donc aucun bruit, et que de choses s’y disent ! que de cris s’y poussent ! que de plaintes au ciel ! Et l’amas de pierres semble muet. Un peu plus haut, que serait cette ville, que serait cette terre 1 Que sommes-nous pour Dieu ? » (Journal d’un Poète, 1835). Il semble qu’il ait songé de bonne heure à faire de méditations analogues la matière d’un poème, si on en juge par cette note du Conservateur littéraire (26e livr., déc. 1820, t. II, p. 246), où il paraît bien qu’il est clairement désigné :