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poèmes antiques et modernes

Et, lorsqu’un vent de feu brise son sein profond,
On devine le vide impalpable et sans fond[1].



Jamais les purs Esprits, enfants de la lumière[2],
De ces trois régions n’atteignent la dernière,
Et jamais ne s’égare aucun beau Séraphin
Sur ces degrés confus dont l’Enfer est la fin.
Même les Chérubins, si forts et si fidèles[3].
Craignent que l’air impur ne manque sous leurs ailes,
Et qu’ils ne soient forcés, dans ce vol dangereux,
De tomber jusqu’au fond du Chaos ténébreux.
due deviendrait alors l’exilé sans défense ?
Du rire des Démons l’inextinguible offense,
Leurs mots, leurs jeux railleurs, lent et cruel affront.
Feraient baisser ses yeux, feraient rougir son front.


    et aux orages toujours menaçants du Chaos qui gronde à l’entour ; ciel inclément, sauf du côté qui reçoit, par réflexion, des murailles du Ciel, encore que bien lointaines, une faible lumière, moins tourmentée par la bruyante tempête. — VII, 210 : Ils se tenaient [le Fils de Dieu et son cortège d’anges] sur le sol céleste, et du bord ils contemplaient le vaste, l’incommensurable abîme, tumultueux comme un océan, sombre, dévasté, sauvage, bouleversé de fond en comble par les vents furieux… — II, 890 : Devant leurs yeux, dans une vue soudaine, apparaissent les secrets du vieil abîme, sombre, incommensurable océan, sans borne, sans dimension, où la longueur, la largeur et la profondeur, le temps et l’espace sont perdus, où l’antique Nuit et le Chaos, ancêtres de la Nature, maintiennent une éternelle anarchie, au milieu du fracas de guerres sans fin, et règnent par la confusion. — La plupart des textes cités dans cette note et dans la précédente se trouvent rassemblés dans la 2e partie, l. IV, ch. 12, du Génie du Christianisme.

  1. Entre 242 et 243 : O, pas de filet.
  2. Var : O, A, B, C2, esprits,
  3. Var : M, 1er  main, Même les Séraphins, Rois des anges fidèles, 2e main, Même les Chérubins, l’effroi des dieux rebelles,