L’armée est une nation dans la Nation ; c’est
un vice de nos temps. Dans l’antiquité, il en était
autrement : tout citoyen était guerrier, et tout
guerrier était citoyen ; les hommes de l’Armée ne
se faisaient point un autre visage que les hommes
de la cité. La crainte des dieux et des lois,
la fidélité à la patrie, l’austérité des mœurs, et,
chose étrange ! l’amour de la paix et de l’ordre,
se trouvaient dans les camps plus que dans les
villes, parce que c’était l’élite de la Nation qui les
habitait. La paix avait des travaux plus rudes
que la guerre pour ces armées intelligentes. Par
elles la terre de la patrie était couverte de
monuments ou sillonnée de larges routes, et le ciment
romain des aqueducs était pétri, ainsi que Rome
elle-même, des mains qui la défendaient. Le
repos des soldats était fécond autant que celui des
nôtres est stérile et nuisible. Les citoyens n’a-