Page:Vigny - Servitude et grandeur militaires, 1885.djvu/294

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lui.

L’Honneur, c’est la conscience, mais la conscience exaltée. — C’est le respect de soi-même et de la beauté de sa vie portée jusqu’à la plus pure élévation et jusqu’à la passion la plus ardente. Je ne vois, il est vrai, nulle unité dans son principe ; et toutes les fois que l’on a entrepris de le définir, on s’est perdu dans les termes ; mais je ne vois pas qu’on ait été plus précis dans la définition de Dieu. Cela prouverait-il contre une existence que l’on sent universellement ?

C’est peut-être là le plus grand mérite de l’Honneur d’être si puissant et toujours beau, quelle que soit sa source !… Tantôt il porte l’homme à ne pas survivre à un affront, tantôt à le soutenir avec un éclat et une grandeur qui le réparent et en effacent la souillure. D’autres fois il sait cacher ensemble l’injure et l’expiation. En d’autres temps il invente de grandes entreprises, des luttes magnifiques et persévérantes, des sacrifices inouïs, lentement accomplis, et plus beaux par leur patience et leur obscurité que les élans d’un enthousiasme subit ou d’une violente indignation ; il produit des actes de bienfaisance que l’évangélique charité ne surpassa jamais ; il a des tolérances merveilleuses, de délicates bontés, des indulgences divines et de sublimes pardons. Toujours et partout il maintient