Page:Vigny - Servitude et grandeur militaires, 1885.djvu/295

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dans toute sa beauté la dignité personnelle de l’homme.

L’Honneur, c’est la pudeur virile.

La honte de manquer de cela est tout pour nous. C’est donc la chose sacrée que cette chose inexprimable ?

Pesez ce que vaut, parmi nous, cette expression populaire, universelle, décisive et simple cependant : Donner sa parole d’honneur.

Voilà que la parole humaine cesse d’être l’expression des idées seulement, elle devient la parole par expérience, la parole sacrée entre toutes les paroles, comme si elle était née avec le premier mot qu’ait dit la langue de l’homme ; et comme si, après elle, il n’y avait plus un mot digne d’être prononcé, elle devient la promesse de l’homme à l’homme, bénie par tous les peuples ; elle devient le serment même, parce que vous y ajoutez le mot : Honneur.

Dès lors chacun a sa parole et s’y attache comme à sa vie. Le joueur a la sienne, l’estime sacrée, et la garde ; dans le désordre des passions, elle est donnée, reçue, et, toute profane qu’elle est, on la tient saintement. Cette parole est belle partout, et partout consacrée. Ce principe, que l’on peut croire inné, auquel rien n’oblige que l’assentiment intérieur de tous, n’est-il pas surtout d’une souveraine beauté lorsqu’il est exercé par l’homme de guerre ?