― Vous saurez d’abord, mon enfant, que je
suis né à Brest ; j’ai commencé par être enfant de
troupe, gagnant ma demi-ration et mon demi-prêt
dès l’âge de neuf ans, mon père étant soldat
aux gardes. Mais comme j’aimais la mer, une
belle nuit, pendant que j’étais en congé à Brest,
je me cachai à fond de cale d’un bâtiment
marchand qui partait pour les Indes ; on ne m’aperçut
qu’en pleine mer, et le capitaine aima mieux
me faire mousse que de me jeter à l’eau. Quand
vint la Révolution, j’avais fait du chemin, et
j’étais à mon tour devenu capitaine d’un petit
bâtiment marchand assez propre, ayant écumé
la mer quinze ans. Comme l’ex-marine royale,
bonne marine, ma foi ! se trouva tout à coup
dépeuplée d’officiers, on prit des capitaines dans la
marine marchande. J’avais eu quelques affaires
de flibustiers que je pourrai vous dire plus tard :