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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

particulièrement mis en faveur en France ; il n’ignore pas le Wallenstein de Schiller, drame d’ambition et de superstitieuse montée vers la toute-puissance, où la femme est demi-complice de l’homme, où une impérieuse « force des choses » est plus qu’à demi favorable d’abord, puis fatale, à l’un et à l’autre.

Lue les 5 et 9 octobre 1830 chez Mme Dorval, « la première tragédienne existante », à qui le poète destine le rôle de l’héroïne ; reçue le même mois à l’Odéon, la pièce est jouée le 25 juin 1831 — mais avec Mlle Georges en maréchale d’Ancre. Les avis d’Alexandre Dumas au cours des répétitions, plus tard ceux de Sainte-Beuve furent acceptés avec docilité par le dramaturge débutant. Un incident relaté par le beau-frère de Victor Hugo expliquerait comment la pièce, annoncée le 22 juin, ne commença véritablement sa carrière qu’à partir du 25. « Après le premier acte, raconte P. Foucher (Entre Cour et Jardin, p. 182), on vint annoncer qu’une indisposition subite de Mlle Georges ne permettait pas de continuer la représentation, qui fut redonnée quelques jours après. On voulut supposer que l’illustre artiste avait été un peu trop serrée dans son corset… » La pièce tient l’affiche près de trente soirs, du 25 juin au 1er août : comme il s’agit de l’Odéon, qui dès cette époque était un théâtre un peu négligé du grand public, on voit qu’il s’est agi là d’un succès réel.

Après ce début, en conséquence, Vigny songe à donner raison à ceux qui avaient salué en lui « un auteur dramatique de plus ». « Je commence un drame de Madame Roland en attendant qu’on joue la Maréchale d’Ancre », avait-il écrit dans son journal le 21 novembre 1830 : après la représentation, les projets se succèdent, en général peu poussés au delà du plan et de quelques scènes épisodiques. Cependant l’attente des milieux littéraires serait favorable. À la Revue des Deux Mondes — qui pouvait à ce moment passer pour bien informée sur tout ce qui touche à Vigny — la chronique de quinzaine du 30 novembre 1832 annonce, à la Porte-Saint-Martin, « la reprise de la Maréchale d’Ancre de M. Alfred de Vigny, en attendant son nouveau drame, qui fera son apparition dans le mois de février prochain… » De fait, le poète, qui public en volume les nouvelles de Stello, songe ces années-là à une Sylvia, tragi-comédie en cinq actes en vers, à une Rachel, drame en cinq actes, et à Quitte pour la peur : la saynète seule sortira des limbes où le poète s’est toujours plu à dispenser une vie incomplète à des créations éventuelles. Beaucoup d’autres drames, des tragédies du Paraclet, d’Érostrate, sont