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LE CHEF DES HURONS

Mais la manœuvre de Wolff n’était qu’une feinte. Dès que la nuit fut venue, il fit embarquer ses cinq mille hommes dans des chalands, qui descendirent le cours de l’eau, jusqu’à la baie de Foulon. Là, il fit débarquer ses soldats et les guida par un sentier escarpé qui conduisait au plateau de Québec. Les soldats français qui gardaient le plateau, se voyant surpris à l’improviste, n’eurent pas le temps d’organiser la défense ; ils furent presque tous massacrés, puis Wolff alla prendre position derrière Québec.

Montcalm, averti de ce qui se passait, réunit les troupes disponibles et accourut en toute hâte, mais il trouva les Anglais rangés en bataille dans la plaine d’Abraham.

Le combat s’engage aussitôt et dégénère bientôt en carnage ; mais, malgré tout leur courage, les Anglais durent lâcher pied.

Fait étrange et peut-être unique dans les annales de la guerre, cette même journée vit tomber les deux généraux en chef : Wolff fut frappé de trois balles, et Montcalm reçut cinq blessures. Tous deux succombèrent presque immédiatement, mais le général français éprouva la suprême satisfaction de voir fuir l’ennemi.

La mort du marquis de Montcalm ne découragea pas les Canadiens, qui continuèrent à défendre leur sol avec une farouche énergie, jusqu’en 1763, époque où l’Angleterre réussit enfin à s’emparer de cette belle colonie.

Alors commença une inquiétante émigration. Ne voulant à aucun prix subir la domination anglaise, un grand nombre de Canadiens s’enfuirent dans le désert, préférant vivre avec les tribus indiennes que de se courber sous le joug du vainqueur.

Ce fut ainsi que naquit cette race de sang-mêlé, appelée Bois-Brûlé, hardis pionniers qui, les premiers, semèrent, dans les vastes solitudes du nord de l’Amérique, les germes de la civilisation.