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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

osant le nommer mon saint tentateur, mon saint satan, avait chanté dans un hymne la gloire du paradis. Et, ce qui n’est pas indigne de remarque, cet hymne, dans une sorte de vers latins mesurés par le nombre de syllabes, non par le rhythme, sauf un ïambe final, se composait de tercets rimés et semblait chercher ainsi dans les décombres du langage romain un relief dont l’Italie nouvelle allait revêtir son idiome populaire. Voici cette ébauche de la transformation commencée :

« Vers la source de l’éternelle vie aspire mon âme altérée ; ces barrières de la chair, mon âme captive cherche à les briser : elle se lève, elle travaille, elle lutte dans l’exil, pour retrouver la patrie, en gémissant sous le poids des afflictions et des maux. Cette gloire que lui a ravie le péché, elle la contemple encore. Le mal présent accroît la mémoire du bien perdu. Qui pourrait dire quelles sont les joies de la paix suprême, là où s’élèvent des palais de vivantes escarboucles, des toits resplendissants de lames d’or, des salles rayonnantes ? Des pierres précieuses forment tout l’édifice ; un or pur, limpide comme le verre, jonche les rues de la cité ; nulle fange, nulle corruption, nulle impureté ne la souille. »

Ad perennis vitæ fontem mens sitivit arida.
Claustra carnis præsto frangi clausà quærit anima ;
Gliscit, ambit, eluctatur exul frui patria.
Etc., etc.