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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

C’est alors que, devant la force barbare et les envahissements de la Turquie, malgré la connivence de Charles IX, qui préludait par cette lâcheté au grand crime intérieur de son règne, entre l’inaction calculée de l’Angleterre, la timidité de l’Autriche, l’épuisement de la Pologne en guerre avec la Moscovie sauvage encore, on vit apparaître le réveil du génie chrétien et resplendir l’étoile d’Occident.

À qui l’honneur de cette résistance et des représailles victorieuses qu’exerçait enfin la chrétienté ? Nommons d’abord un pape, Pie V, le religieux dominicain parvenu de la plus humble origine au siége pontifical, prêtre austère et zélé, d’un esprit violent, a-t-on dit, mais ayant de la grandeur et de la prévoyance.

C’est ce pontife qui, dès la première menace des Turcs contre l’île de Chypre, sollicita vivement une ligue de quelques États chrétiens. Prêcher la croisade n’était plus possible dans l’Europe divisée par les ambitions des princes et le schisme religieux. Mais, si le pape ne pouvait plus entraîner toute l’Europe à une guerre sainte, que Luther avait blâmée comme injuste et inhumaine, il pouvait du moins y prendre part et donner à sa souveraineté temporelle le plus glorieux emploi.

Rien n’arrêta, dans cette œuvre, le zèle du généreux pontife, pas même les lenteurs égoïstes et la froide astuce du monarque dont il devait le plus espérer le secours. Philippe II, en effet, impitoyable pour les

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