Dans la liberté d’écrire qui était dès longtemps le droit commun des Anglais, et parmi les hommes d’étude et de talent dont elle faisait la force, on rêvait volontiers quelque chose au delà de cette liberté bien acquise et peu gênée. Les livres un moment célèbres de Thomas Paine, de Godwin, de Mistress Macaulay, en sont la preuve : et cette exagération des publicistes devenait aussi celle des poëtes. Alors, en effet, se formait une école de poëtes démocrates, mécontents de la liberté anglaise, et projetant une révolution dans leur patrie ou une république nouvelle en Amérique.
Le mieux inspiré de ces visionnaires était Coleridge, longtemps célèbre avant Byron, et qui lui a survécu. Ses premiers élans de poésie avaient célébré la prise de la Bastille. Son enthousiasme avait résisté à bien des attentats couverts du nom de liberté : ses malédictions s’attachèrent, aux tentatives des coalisés contre la France et surtout à l’alliance de l’Angleterre avec l’impure et despotique souveraine de la Russie. Et ce n’est pas là toutefois, malgré la passion du poëte, que parut sa vraie grandeur. Comme Alfieri, comme Monti, comme d’autres étrangers enivrés du premier vin de la Révolution française, il est plus déclamateur qu’éloquent, il a plus d’emphase que de poésie. Les beautés vraiment lyriques où il s’est élevé, ce sont ses souvenirs des Alpes et de l’Allemagne, des paysages magnifiques et des vertus simples de la Suisse ; c’est enfin sa douleur, quand il voit la liberté de ce peuple menacée