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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

inspirée, et lorsqu’ils étaient répétés par la première ferveur du culte évangélique les divinisant de nouveau ? Bossuet seul et Racine ont retrouvé tout entier ce feu, couvert sous la parole des prophètes d’Israël : ou bien aussi parfois, dans le coin d’une église, quelque âme pieuse, en extase sur la leçon du jour, aura senti, dans la plus simple version de quelques fragments épars d’Isaïe, l’accent divin que lui aura révélé sa foi.

Pour nous, tachons seulement ici de ne pas détruire par l’expression ce que l’âme seule peut rendre, ce que l’âme seule peut saisir, ce qu’a senti le Prophète, devant la chute du roi de Babylone. C’est peut-être le plus beau chant de la lyre hébraïque :

« Comment a cessé l’oppresseur et s’est arrêtée la main qui arrachait l’or ?

Jéhovah a brisé la verge des impies, le sceptre des tyrans.

Celui qui frappait cruellement les peuples d’une plaie irrémissible et dominait les nations avec colère est abattu sans obstacle.

Toute la terre repose ; elle est tranquille, ou elle éclate en chants d’allégresse.

Les pins mêmes se réjouissent de sa chute, et les cèdres du Liban, qui disent : Depuis que tu es gisant, le bûcheron n’a pas gravi pour nous émonder.

L’enfer s’est ému soudainement pour venir au devant de loi. Il a réveillé pour toi les décédés et tous