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LE TEMPS

aimoit cependant mieux Balkir, ou plutôt qu’il l’aimoit avec plus d’empressement, & qu’il avoit plus d’inquiétude lorsqu’il étoit forcé à s’éloigner d’elle pour quelques moments, que quand il quittoit Merille.

De tels mouvements, à qui la présence de cette jeune Princesse ne laissoit que l’agrément de l’amour, n’empêchoient pas cette auguste Troupe de jouir d’un doux repos. Les Princes travailloient avec le Roi au bien commun, & leurs sœurs les aidoient selon leurs forces, serrant les fruits, & préparant les choses nécessaires à leur nourriture.

Si cette vie pénible & tranquille contentoit les freres de Merille, qui y étoient accoutumés, elle eut bientôt dégoûté cette jeune Princesse & les enfants du Roi de Bengal, à qui elle devint fade & insipide ; l’ennui les saisit tellement, qu’ils brûloient du desir de la quitter.

Quel triste temps, disoit Balkir à son frere, un jour qu’ils se trouvoient seuls ? Faudra-t-il passer notre vie à cette ennuyeuse occupation, & sommes-nous donc nés, vous pour labourer la terre, & moi pour traire les chevres ? Qui nous empêche de quitter ce lieu sauvage ? Ne sommes-nous pas sortis de la Cour de Ben-