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LE TEMPS

la condition bornée où le sort l’avoit fait naître, ou si elle fût née sur le Trône, elle auroit eu de la vertu. La seule ambition qui la possédoit, avoit pu être assez puissante pour changer son caractere, sans toutefois lui avoir inspiré de cruauté. La douceur naturelle à son sexe ne lui permettoit pas de former aucun dessein criminel contre la vie du Roi, ni contre celle des Princes ; mais elle vouloit régner sûrement & long-temps. Elle étoit même encore flattée du plaisir de mettre le Sceptre en sa famille, séduite à cet égard par la chimere de vivre dans l’avenir, que l’on qualifie du vain titre d’amour pour la belle gloire, & qui fait faire aux ambitieux tant de démarches contre leur devoir, afin que l’on parle d’eux, lorsqu’ils ne pourront jouir de la satisfaction de l’entendre : mais elle n’étoit pas assez affermie dans son dessein pour l’éxécuter aux dépens des jours du Roi & de ses enfants. Si elle eût eu un autre Confident que le perfide Mouba, (c’est le nom du Sacrificateur) loin de persister dans cette dangereuse intention, elle s’en seroit désistée plus promptement qu’elle ne l’avoit formée, en considérant qu’il ne lui étoit possible d’y parvenir que par des moyens aussi criminels que sanguinaires.