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ET LA PATIENCE.

en préserver… A ces mots, qui redoubloient la peine du Prince, Merille s’appercevant que l’Esclave pleuroit, se jetta tout d’un coup à ses genoux : Ma bonne mere, lui dit-elle, d’un air touchant, ce seroit peut-être le seul moyen de nous délivrer tous, que de sauver la vie à ce Prince, & de le préserver de la transformation générale. J’ai un pressentiment qui me dit que c’est lui qui doit nous tirer d’esclavage, & qu’il punira le monstre de tous ses crimes… Vous ne devez pas douter, continua-t-elle, que, si ce bonheur arrivoit par votre secours, nous ne vous rendissions riche à jamais.

Ces mots attendrirent la vieille, & lui donnerent le courage de s’exposer à tous les malheurs qu’elle prévoyoit, si cette trame se découvroit, comme il étoit moralement impossible qu’elle ne se découvrît pas. Je veux vous prouver à quel point vous m’êtes chere, aux dépens de ma vie, lui dit-elle, car je vois bien que je me vais perdre sans vous sauver. Mais le péril certain qu’il y a à cacher quelqu’un ici, ne m’en détournera pas ; je le connois, & je ne m’y exposerai pas moins, sans que ce soit l’intérêt qui me fasse agir, puisque je ne manque de rien en ce lieu. Je vais donc mettre le Prince dans le ré-