Page:Villetard de Laguérie - La Corée, indépendante, russe, ou japonaise.djvu/228

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par les rivalités des prétendants, donnait au peuple le scandale de manquements éclatants aux lois dont elle lui imposait le joug. Une oligarchie, unissant le prestige d’un monopole immémorial du gouvernement à celui de la naissance, mais dépourvue de la moralité et de l’esprit politiques d’une véritable aristocratie, méconnaissait la prédominance nécessaire des intérêts généraux de la communauté sur ceux de chacun de ses membres, et traitait l’État comme certains fermiers malhonnêtes un fonds qu’ils épuisent sans égard à sa ruine éventuelle. L’armée équivalait à peine à un corps de police mauvais et sans force ; la marine n’existait pas. Le système de gouvernement était pire encore que celui de la Chine. Le trésor public était transformé, par des princes imprévoyants et peu dignes, en tonneau des Danaïdes. La population, sans aucune notion des devoirs qui incombent à un peuple simplement soucieux de vivre, n’avait que du mépris pour les devoirs militaires ; sans industrie, sans commerce, sans avance d’aucune sorte, elle végétait à la merci d’une sécheresse persistante, d’un hiver trop rigoureux, d’une inondation, d’un cyclone ou d’un tremblement de terre. Seuls, le Confucianisme et la forte vie familiale qu’il entretient, constituaient une sorte de colonne vertébrale à cette masse gélatineuse, qui, sans lui, se serait aplatie en un informe magma, comme une méduse lancée par une vague sur une roche.

Tel était le bilan de la Corée au moment où les Japonais en firent la conquête.