Page:Villiers de L'Isle-Adam - Contes cruels.djvu/336

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Il célèbre l’Anniversaire pascal, en mémoire de ses pères guidés par Moïse au sortir de Misraïm, la Maison de servitude ; l’anniversaire du grand soir où, bravant les chars furieux et les armées, ils s’enfuirent vers la Terre promise ; l’anniversaire du sinistre lever de lune où Iahvè, l’Être-des-dieux, confondit, au milieu des vagues de la mer Rouge, le cheval et le cavalier.

Oui, le Roi consacre le festin du soir !… Sa droite s’appuie sur l’épaule séculaire du médiateur Helcias, l’interprète des symboles, le ministre des pouvoirs occultes.

Helcias, fils de Schellüm et de Holda, la prophétesse, est pareil au désert, plus stérile encore après les tombées de la manne. Il a franchi les épreuves et les a bénies comme l’arbre du Liban parfume la hache qui le frappe ; mais il porte, au-dessus de ses larges orbites, la marque de son œuvre accomplie : le temps a dénudé ses sourcils, les sourcils accordés à l’Homme seulement pour que la sueur qui doit rouler de son front ne ruisselle pas jusqu’en ses yeux et ne l’aveugle pas.



L’eau lustrale tombe, resplendissante, dans les bassins d’or. Les captives royales, chargées d’anneaux et de bracelets d’ambre, et les saras, princesses de parfums, agenouillées au milieu des coussins, font brûler, avec des gestes sabbatiques, les poudres de myrrhe