Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/144

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que la machine humaine de Hadaly, comme disent nos médecins. Si vous connaissiez déjà le charme de l’Andréïde venue au jour, comme vous connaissez celui de son modèle, aucune explication ne vous empêcherait de le subir, ― non plus que l’aspect, par exemple, de l’écorché de votre belle vivante ne vous empêcherait de l’aimer encore, si elle se représentait, ensuite, à vos yeux, telle qu’elle est.

Le mécanisme électrique de Hadaly n’est pas plus elle ― que l’ossature de votre amie n’est sa personne. Bref, ce n’est ni telle articulation, ni tel nerf, ni tel os, ni tel muscle que l’on aime en une femme, je crois ; mais l’ensemble seul de son être, pénétré de son fluide organique, alors que, nous regardant avec ses yeux, elle transfigure tout cet assemblage de minéraux, de métaux et de végétaux fusionnés et sublimés en son corps.

L’unité, en un mot, qui enveloppe ces moyens de rayonnement est seule mystérieuse. N’oublions donc pas, mon cher lord, que nous allons parler d’un processus vital aussi dérisoire que le nôtre, et qui ne peut nous choquer que par sa… nouveauté.

― Bien, répondit lord Ewald, avec un grave sourire. Je commence donc. ― Tout d’abord, pourquoi cette armure ?

― L’armure ? dit Edison, ― mais je vous l’ai donné à entendre : c’est l’appareil plastique sur lequel se superposera, pénétrante et pénétrée en l’unité du fluide électrique, la carnation totale de votre idéale amie. Il contient, fixé en lui, l’organisme intérieur commun à toutes les femmes.

Nous l’étudierons dans quelques instants sur